édition du Saguenay-Lac-St-Jean)
En Occident, les États-Providence
sont en crise. Certains, comme la Grèce et l’Espagne, se disloquent et tombent
en faillite. D’autres, comme la France, foncent droit dans le mur.
Tel est le fruit de 40 ans de
financement d’un interventionnisme étatique débridé par la dette et le déficit.
Le Québec n’y échappe pas. Le dernier
budget le démontre amplement. Et si l’État québécois ne pouvait pas compter sur
les milliards de transferts fédéraux et de péréquation, nous serions dans la
même situation que l’Espagne ou la Grèce. Certainement la France en tout cas.
D’ailleurs, le Gouvernement québécois
le reconnait implicitement puisqu’il trouve qu’il ne reçoit pas assez de manne
fédérale. Alors, imaginez s’il n’en recevait pas du tout. Nous serions au bord
de la banqueroute.
Mais, même avec le B.S. fédéral
(largement financé par ailleurs par les dollars du sale pétrole albertain), la
situation budgétaire du Québec n’en demeure pas moins alarmante. Qu’on le
veuille ou non, notre État-Providence, lui aussi, est plongé dans une crise,
non pas seulement circonstancielle, mais intrinsèque, structurelle. En fait,
nous nous dirigeons rapidement dans un cul-de-sac.
Peut-on l’éviter? Pas avec le budget
Marceau, assurément. Il est vrai que l’on vise un budget équilibré (ce qui est
louable), mais en s’engageant dans le même processus que le gouvernement de
Lucien Bouchard à la fin des années 90. Ce qui veut dire que l’on continue
d’engloutir des milliards dans le système de santé (un puits sans fond) sans
que l’on puisse constater une amélioration des services et que, en même temps,
toutes les autres missions de l’État se voient imposer de douloureuses
compressions budgétaires.
Mais la démarche Bouchard est-elle
toujours appropriée? Le budget de la santé va bientôt atteindre 50% des
dépenses de l’État. Sans résultats probants. Par ailleurs, est-il raisonnable
et judicieux de toujours faire subir aux autres missions de l’État de sévères
amputations de ressources et de moyens d’actions?
Manifestement, personne, au sein de
la classe politique ne songe à revisiter notre État-Providence afin de le
remodeler en profondeur. C’est pourtant ce qu’il faudra faire. En Europe, les
seuls pays qui se portent relativement bien sont ceux qui ont mené à terme des
réformes majeures de leur État-Providence en vue d’en réduire les coûts,
l’envergure et l’amplitude. La corpulence, quoi! La France, qui refuse toujours
de le faire, s’enfonce dans le déclin.
Chez nous, il faudra bien un jour reconfigurer
notre système de santé. Les solutions sont toutes connues. Dans une pile de
rapports. Claude Castonguay vient tout juste de les exposer dans un livre
récent. On ne pourra non plus éviter d’élargir la place du privé. Le courage
manque.
D’autres grosses structures de
l’État-Providence devront être réformées. Les services de garde, l’assurance
parentale, les commissions scolaires, l’échafaudage compliqué des subventions
aux entreprises, les régimes de retraite, ce sont tous des programmes plus ou
moins chromés qu’il faudra rénover pour les rendre moins coûteux. Afin de vivre
selon nos moyens, ce que nous ne faisons pas depuis 40 ans.
Il est cependant bien évident qu’un
gouvernement minoritaire n’est pas en mesure d’entreprendre cette nécessaire
transformation de notre État-Providence. Il n’en a ni les moyens, ni la capacité. Et sans
doute pas la volonté. Mais la tâche méritoire de revenir au déficit zéro ne
dispensera pas la classe politique de l’incontournable chantier de
restructuration de l’État-Providence.
Plus on retarde, plus ce sera douloureux.
Jacques Brassard
4 commentaires:
Je ne crois pas que le Québec est réformable car aucun parti politique n'a le courage de toucher aux privilèges des défenseurs du modèle québécois. Notre classe politique et une majorité de Québécois jouent à l'aveuglement volontaire. Ce sont les générations futures qui vont payer le gâchis laissé par le gouvernement du Québec qui achètent les votes de la génération boomer afin de gagner les élections. Les dernières élections générales m'ont vraiment ouvert les yeux. La province n'est pas réformable. On assiste impuissant au déclin de la Belle province et on ne peut pas rien faire pour arrêter cela.
Le seul salut pour les pays occidentaux est un retour aux RESPONSABILITÉS INDIVIDUELS. L`Etat ne peut pas prendre les responsabilités de tous et chacun sur ses épaules. C`est toujours mieux qu`un individu ou une entreprise fasse faillite qu`une société au complet.
Les politiciens doivent arrêter les promesses folles pour gagner des votes. C`est le plus gros problème de la démocratie.
Je ne suis pas optimiste quant à la volonté de qui que ce soit d`enteprende quoi que ce soit. Le voudrait on que le bon peuple aurait tôt soin de se débarasser des gênants après le traitement humilant que les médias leurs auraient déjà allégrement fait subir.
La dernière élection américaine en offre une belle illustration.
Réussirions nous à procéder à certaines réformes majeures que le gouvernement suivant s`employerait aussitôt à dilapider cette marge de manoeuvre pour acheter auprès d`une population peu ou mal informée les votes nécessaires pour son maintien au pouvoir.
L`Angleterre après Thatcher et les États-Unis après Reagan illustrent ce point.
Compte tenu du lavage de cerveau opéré depuis deux générations par notre système d`éducation et nos médias d`information, je doute que qui que ce soit puisse y changer grand chose, si ce n`est évidemment les agences de crédits, nos créanciers et les Albertains qui vont bien finir par en avoir assez.
La dernière élection fédérale a assez bien illustré le degré de maturité politique et économique des Québécois.
Réal Carbonneau
En réaction à:
"Ce qui veut dire que l’on continue d’engloutir des milliards dans le système de santé (un puits sans fond) sans que l’on puisse constater une amélioration des services (...)."
- Jacques Brassard
Ma mère a oeuvré 40 ans comme infirmière auxiliaire à l'Hôtel-Dieu d'Alma. Elle a participé aux grêves majeures de l'histoire récente pour finalement constater que le personnel soignant passait du chevet du malade vers les bureaux.
Juste avant sa retraite (il était 16 h moins une), ma mère aidait une patiente à marcher dans le couloir quand d'autres membres du personnel la pressaient de les rejoindre pour les adieux d'usage. Elle disait aimer son métier et surtout: aimer les malades. N'est-ce pas amusant? Aimer les malades... Régulièrement, elle rapportait à la maison des fleurs reçues en cadeau d'un patient. Parfois, on lui donnait des bijoux de grande valeur! C'était avant que les cadeaux soient interdits...
Le système de santé québécois tient la palme des gouffres financiers en raison de cette dynamique bureaucratisante. On cherche un remède dans le portefeuille du ministre des Finances sans succès. Mieux vaut revaloriser les métiers de la santé sous leur aspect vocationnel. Formons et recrutons des soignants soucieux du meilleur contact avec le soigné. Et que le vent tourne de l'autre bord! Les pitonneux cachés à grands frais dans les bureaux de nos hôpitaux au Québec pâliront d'envie devant l'équipe au front, dans le feu de l'action, qui prend plaisir à aider ses semblables.
La culture des affaires et de l'argent en vogue depuis les années 80 et ses pressions sur tout-un-chacun ont éloigné des passionnés de leur vocation première. Tout va tout croche quand quasiment personne n'est à sa place.
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