(Chronique parue le 28 décembre dans le Journal de Québec)
L’attelage de caribous du Père-Noël
est-il formé de caribous de la toundra ou de caribous forestiers? La question
est fondamentale car si ce sont des caribous forestiers, ils constituent, selon
Greenpeace, une espèce menacée, et il faut non seulement protéger leur habitat
mais interdire au Père-Noël de les
fouetter.
Lorsqu’il y a plus de dix ans, étant
ministre des ressources naturelles, on m’avait informé sur le «caribou
forestier», j’avais fait preuve d’une certaine perplexité. Le «caribou
forestier»? C’est quoi, ça? Un caribou trop paresseux pour migrer vers le nord?
Un caribou qui a décidé de manger comme l’orignal?
En fait, j’ai compris plus tard
pourquoi les écolos (et surtout Greenpeace) voulaient en faire une espèce
particulière. C’est qu’en protégeant son habitat, voyez-vous, on se trouvait à
justifier l’interdiction de récolte dans la forêt fréquentée par cette nouvelle
icône faunique. Il fallait absolument donner le statut d’aires protégées à ces
territoires.
Je n’ai jamais adhéré à cette
approche. Pourquoi l’orignal, l’ours, le loup, le renard, le lièvre sont-ils en
mesure de s’adapter dans un milieu forestier faisant l’objet de récolte…et pas
le caribou dit forestier?
La question est d’autant plus
pertinente que, depuis plusieurs années, on pratique ce qu’on appelle la coupe
en mosaïque, ce qui signifie qu’on ne prélève qu’entre 40 et 50% de la matière
ligneuse. Toutes les espèces s’accommodent très bien de ce mode d’exploitation.
Et pas le caribou?!
Il saute aux yeux qu’on est en face
d’une entourloupette pour augmenter la superficie d’aires protégées en forêt
boréale. Et on sait qu’en matière de mystification et de désinformation,
Greenpeace est inégalable.
N’oublions pas non plus que la
multinationale verte et ses caciques «sont devenus au fil des années, écrit
Pierre Kohler dans son livre, Le Vrai Visage des Guerriers Verts, toujours plus
intolérants dans leur vision des choses, plus insatiables dans leurs exigences
et plus effrontés dans leurs affirmations.»
Il faut bien évaluer les conséquences
d’une pareille croisade. Déjà, depuis quelques années, en visant 8%, puis 12%
d’aires protégées en forêt boréale, il en est résulté une baisse substantielle
de la possibilité forestière. Donc un déficit d’approvisionnement qui se
traduit concrètement en pertes d’emplois.
Si vous soustrayez 3 millions de
mètres cubes à des fins de protection du caribou dit «forestier», c’est 9000
emplois de moins dans un secteur économique déjà durement touché par la crise.
Est-ce que Greenpeace se soucie des
êtres humains qui seront éjectés du marché du travail par la mise en œuvre de
son plan de sauvetage du caribou dit «forestier»? Pas le moins du monde!
Greenpeace, dans toute son histoire, ne s’est jamais préoccupé des dégâts
humains provoqués par ses positions et ses actions écolo-extrémistes.
Greenpeace a toujours réservé sa compassion pour les baleines, les ours blancs
ou les caribous. Les travailleurs jetés à la rue, Greenpeace s’en fout!
Et voilà que Greenpeace part en
guerre contre Résolu (l’ex Abitibi-Bowater) qui a pourtant reçu la
certification FSC en matière d’aménagement. Les Guerriers Verts vont massacrer
sa réputation si l’entreprise ne capitule pas. On connait «les méthodes
mafieuses de Greenpeace», selon l’expression d’un quotidien suédois. «Si vous
faites ce que nous vous disons de faire, nous vous laisserons en paix. Sinon…»
Il est don impérieux que l’industrie
forestière, les syndicats, le monde municipal et l’État résistent à ce chantage
éhonté de Greenpeace. L’avenir de l’industrie forestière en dépend.
Jacques Brassard