(Chronique parue le 22 février dans le Journal de Québec)
La Ministre des Ressources
Naturelles, Martine Ouellet, vient encore d’imposer sa vision énergétique en
annulant six projets de mini-centrales hydroélectriques et en mettant au
rancart le programme qui les avait fait naître.
C’était inévitable, nous dit-elle,
surtout à partir du moment où Hydro-Québec
nous avise qu’elle a des surplus d’énergie. Mais ce n’est là qu’un
prétexte pour liquider un programme qui a toujours suscité une vive résistance
de la part de la mouvance verdoyante.
Je me souviens fort bien de
l’opposition farouche des écolos qui s’était manifestée lorsque, à titre de
Ministre des Ressources Naturelles, j’avais en quelque sorte ressuscité le
programme des petites centrales (lancé sous Bourassa), tout en le modifiant. Et
aussitôt que j’eus quitté la politique, le PM Bernard Landry, se trouvant à la
veille d’élections générales, s’est empressé de «geler» le programme dans le
but évident d’amadouer les verts.
Les Libéraux l’avaient ensuite remis
en vigueur. Et voilà maintenant que la ministre Ouellet, qui vibre toujours à
l’unisson du clergé écolo, l’abolit de nouveau.
Et si elle a toutefois maintenu la
mini-centrale de Val-Jalbert, c’est exclusivement pour des motifs politiques.
Elle ne pouvait se mettre à dos ses cinq collègues du Saguenay-Lac-St –Jean.
Elle ne pouvait non plus désavouer les efforts communautaires à l’origine du
projet. Elle l’a donc autorisé. À contre cœur, sans nul doute! Pour le reste,
elle a agi en parfait accord avec ses convictions et celles de ses camarades
écolos.
Car, il ne faut pas l’oublier, pour
les brigades vertes, les petites, les moyennes et les grandes centrales hydroélectriques, c’est du pareil au
même. Ce sont toutes, comme le dit si bien le gourou Paul Piché, des
«cauchemars écologiques». Harnacher une rivière, même si c’est au fil de l’eau,
c’est un sacrilège, c’est profaner la Nature, c’est violenter Gaïa, c’est
souiller l’Esprit des Eaux.
Et ne leur parlez surtout pas des
retombées économiques bénéfiques de tels projets pour les communautés
concernées, ils s’en contrebalancent!
Encore une fois, je le répète, tous
les arguments rationnels n’ont aucune prise sur tous les Roy Dupuis et Paul
Piché de ce monde. Eux, ils se cantonnent dans l’idéologique et le passionnel,
pour ne pas dire le religieux. C’est d’ailleurs pourquoi ils sont souvent belliqueux. Et leur agressivité épouvante et
fait plier la classe politique.
Mais il faut aussi parler du fondement
proclamé de la décision de la ministre : le surplus d’énergie. C’est sans
doute un fait, mais j’ai du mal à croire que les quelques dizaines de mégawatts
provenant des mini-centrales aggraveraient tellement la situation de surplus.
Mais ce qui, cependant, me désarçonne
le plus, c’est de voir la ministre justifier pour cause de surplus l’annulation
du programme de mini-centrales et, du même souffle, autoriser un parc éolien de
800 MW dans la Réserve des Laurentides.
Quelques dizaines de MW issus des
petites centrales, c’est carrément intolérables compte tenu des surplus
d’énergie mais 800 MW produits par des éoliennes, c’est tout à fait
indispensable. Plus incohérent que ça…
En fait, je sais bien pourquoi.
Autant la petite hydraulique est perçue par les Verts comme une intolérable
atteinte à Mère-Nature, autant les plantations de gigantesques vire-vent sont
considérées comme des actions éminemment respectueuses de l’environnement et un
hommage liturgique au Dieu des Vents.
Et, étrangement, quand il s’agit
d’Éole, le coût élevé de l’énergie produite et l’inefficacité connue de cette
filière ne sont pas pris en compte. Un superbe cafouillage énergétique!
Jacques Brassard