Le projet de loi 25 a pour objectif
de mettre fin au gel du tarif d’électricité dit patrimonial et le remplacer par
une indexation annuelle.
Cette initiative du gouvernement
québécois m’a soudainement ramené à mon passé politique puisque c’est moi qui,
en 2001, a présenté, défendu et fait adopter (j’ai d’ailleurs dû recourir sans
remord au bâillon à titre de leader du gouvernement) le projet de loi 16 qui,
justement, introduisait dans notre législation ce concept, nouveau et original,
de «tarif patrimonial» d’électricité.
Il m’apparait utile de se rappeler
pourquoi et comment nous en sommes arrivés à ce mécanisme tarifaire tout à fait
novateur.
Disons d’abord qu’à partir de la
nationalisation de l’électricité en 1962, Hydro-Québec a massivement investi
dans la filière hydroélectrique. Avec comme résultat, la formation d’un immense
parc de centrales et de barrages (pensons à Manic et à La Grande) dont la
quantité d’énergie produite se chiffrait à 165 terra watts heure.
C’est ce que Jean-François Bernard,
expert en la matière de l’Université Laval, a appelé…la «vieille électricité».
Partant de là, nous nous sommes posé
la question à mon sens fort pertinente : quel est le coût du kilowatt
heure de cette «vieille électricité» produite par notre patrimoine
hydroélectrique? Puisque ces barrages et centrales sont soit complètement, soit
largement amorti, nous avons calculé le coût KWH à 2,79 cents.
Et il nous est apparu justifié que ce
devait être le prix que paierait le consommateur québécois.
Et qu’il faudrait le fixer par voie
législative. C’est ce prix (2,79 cents) que nous avons désigné du nom de «tarif
patrimonial».
À l’époque, nous consommions 150 TWH.
On prévoyait que nous atteindrions les 165 TWH en 2004. À ce moment-là, la nouvelle énergie dont
aurait besoin Hydro-Québec Distribution serait achetée sur la base d’un tarif
déterminé par la Régie de l’Énergie. C’est d’ailleurs une procédure que nous
connaissons bien depuis quelques années.
Et voilà que le gouvernement ne peut
pas résister à la tentation de remettre en question les acquis de la
nationalisation de l’électricité (tarifs uniformes et bas) à seule fin de
siphonner des centaines de millions de dollars dans la besace du contribuable québécois.
La voracité fiscale de l’État n’a
plus de limites!
Les Libéraux avaient annoncé leur
intention de rouvrir la loi pour rehausser le tarif patrimonial. Voilà
maintenant que les Péquistes s’engagent dans la même voie.
En indexant, chaque année, le tarif
patrimonial, le gouvernement va engranger des millions qui vont s’ajouter aux
millions résultant des hausses tarifaires autorisés par la Régie de l’Énergie.
Pourquoi presser le citron une seule fois quand il est possible de le presser
deux fois?
J’en reviens pas! Le contribuable
québécois –c’est de notoriété universelle – est celui qui, au Canada et en
Amérique du Nord, doit subir le plus lourd fardeau fiscal. «Globalement, selon
l’Institut Économique de Montréal, tous impôts confondus, le citoyen québécois
moyen cède au fisc plus de 40% de ce qu’il gagne.» De sorte que la journée
d’affranchissement de l’impôt au Québec est la plus tardive au Canada (à part
Terre-Neuve). Elle a lieu le 17 juin. Mais il reste quelques plumes au pigeon.
Comme contribuables et consommateurs,
les Québécois ne jouissaient que d’un seul avantage, soit un tarif
d’électricité le plus bas en Amérique. À cause d’un tarif patrimonial fixé dans
une loi. L’Assemblée Nationale s’apprête à le lui retirer.
Et aucun parti politique ne daigne
prendre leur défense.
Je trouve cela proprement scandaleux.
Et honteux.
Jacques Brassard