jeudi 18 mars 2010

SUR LE CALENDRIER SCOLAIRE DU QUÉBEC

Ci-dessous, un texte de Louis O'Neil, un ancien collègue du temps de René Lévesque. Comme je suis pleinement d'accord avec son contenu, il m'a autorisé à le publier sur mon blog.
SANS RACINES ET SANS AILES



Le nouveau calendrier d’enseignement que veut faire adopter la ministre de l’Éducation contient quelques bizarreries. Soucieuse d’amadouer une minorité hassidique récalcitrante la ministre propose un chambardement spectaculaire du calendrier qui pourrait s’appliquer éventuellement à toutes les écoles maternelles, primaires et secondaires du Québec, aussi bien publiques que privées. Elle veut apparemment démontrer une grande volonté d’accommodement contrastant avec son refus brutal d’entendre la requête fort légitime de parents chrétiens qui demandent simplement qu’on accorde à leurs enfants le droit d’exemption, prévu par la loi, face à un enseignement religieux étatique qui heurte la liberté de conscience.



Pièce centrale du chambardement proposé : l’abrogation de l’article 19 du Régime pédagogique, qui contient la liste des congés obligatoires à l’échelle du Québec : les samedis et les dimanches, le premier juillet, le premier lundi de septembre, l’Action de Grâce, les 24,25 et 26 décembre, le premier et le deuxième jour de janvier, le Vendredi-Saint et le Lundi de Pâques, la Fête des patriotes ( ou la Fête de la Reine) ,la Saint-Jean. Plusieurs de ces jours de congé sont porteurs d’une riche signification historique, culturelle et sociale. En les supprimant on appauvrit la mémoire collective.



Le changement est gros, énorme. Je suis persuadé que les pieux hassidim n’en demandent pas tant. Ils aimeraient bien qu’on leur accorde quelques privilèges ; pour le reste ils n’ont que faire. Ils vivent dans une bulle. C’est sans doute pourquoi ils n’ont pas bien mesuré la capacité d’aplatventrisme d’une sous-espèce de l’homo quebecensis : née pour un petit pain, toujours prête à s’excuser, à s’écraser, à se piler elle-même sur les pieds, à reconnaître à d’autres des droits qu’elle se refuse.



Mais il existe une telle disproportion entre ce que réclament de petites communautés hassidiques et l’ampleur du chambardement proposé qu’on doit se demander s’il ne faut pas chercher ailleurs que dans un souci maladif d’accommodement la raison de cet invraisemblable remue-ménage.



Des explications me viennent à l’esprit. Il se peut par exemple que le dossier de quelques écoles juives fournisse l’occasion d’ouvrir la porte à une relance discrète de l’opération de déracinement qui vise à couper la société québécoise de ses racines, de son socle identitaire. Qu’on se rappelle l’imposition du calendrier interculturel, en septembre 2009. En y ajoutant l’abrogation de l’article 19 du Régime pédagogique on réussirait peut-être à aggraver l’anesthésie de la mémoire collective.



Plus spécifiquement, l’abrogation de cet article permettrait éventuellement d’évacuer des commémorations d’origine chrétienne : les dimanches, Noêl, le Vendredi-Saint, Pâques. Ces jours de congé à connotation religieuse agacent des sensibilités laïques. En les supprimant on se rapprocherait de l’idéal d’une société vraiment neutre, aseptisée, sans racines et sans ailes. Cette rupture plairait sûrement aux laïcistes de stricte observance. Chez ces derniers le ressentiment à l’égard d’un passé chrétien l’emporte sur le devoir de transmission d’un riche héritage



Autre explication plausible : faire progresser l’utopie d’une société nouvelle, improvisée, comme en ont rêvé jadis les disciples des Lumières qui, au temps de la Révolution française, fabriquèrent un nouveau calendrier avec des mois et des semaines aux désignations ésotériques ; ou comme le souhaitaient les révolutionnaires bolchéviques qui modifiaient les noms des villes et inventaient de nouvelles fêtes civiques dans le but d’occulter les fêtes traditionnelles. Mais ça n’a pas fonctionné. La France a retrouvé son vieux calendrier, Leningrad est redevenue Saint-Pétersbourg et le nom de Stalingrad n’a pas tenu le coup. Pas facile de réinventer l’histoire.



Reste à voir si le scénario imaginé par nos Lumières dépassera le stade de l’utopie. J’ai l’impression que le vieux fond identitaire québécois déclenchera un sursaut qui contribuera à évacuer du décor ce projet d’une société sans racines et sans ailes.



LOUIS O’NEILL

Mars 2010

12 commentaires:

Anonyme a dit…

Quand on est rendu à vouloir aller aussi loin que cela, c'est qu'on a vraiment une posture nihiliste ...conséquente (mais la nature a horreur du ... vide).


Cette table rase de l'idéologie laïciste nous réservera des surprises au Québec.

Les tensions entre les générations (Bonjour Jacques Grand'Maison) existent encore sur le plan des questions religieuses et identitaires.




Pierre Brassard
Montréal

Anonyme a dit…

Je ne crois pas que les Québecois vont bouger. Ce qui compte pour le Québecois c'est le sport et les festivités collectives (festival de jazz et autres). Quand un peuple dit non 2 fois à son indépendance, que voulez-vous qu'on fasse. Pour les québécois, un premier compteur de la ligne de hockey, c'est bien plus important que, par exemple, un scientifique ou un philosophe. Leur langue ! bof, ils s'en balancent. Ils ne savent pas encore que le mot idée est féminin, qu'on ne dit pas un entente mais une entente. J'ai entendu ce matin un dirigeant syndical faire trois fautes en deux phrases : un idée, un entente, etc. Les québécois ne lisent pas, bien trop fatiguant. Ils n'ont aucune culture alors qu'est que ça peut ben leur faire de la perdre. Pour eux l'école ça ne sert qu'à apprendre un métier, rien d'autre.

Le peuple québécois aura disparu d'ici 50 ans.

Anonyme a dit…

Au de "je me souviens" le slogan du Québec devrait être: "Après moi le déluge" phrase célèbre de Louis XIV...

Anonyme a dit…

Les pieux Hassidim aimeraient que leurs garderies et écoles soient ouvertes à l’Action de Grâce, les 24,25 et 26 décembre, le premier et le deuxième jour de janvier, le Vendredi-Saint et le Lundi de Pâques, qui sont effectivement des fêtes religieuses catholiques. Ils aimeraient enseigner le dimanche. Pourquoi? Parce que leurs garderies et écoles sont fermées à Rosh Hashanah, Yom Kippour, Succoth, Pessah (pâque), Shavuot (Pentecôte) et sans doute à d'autres occasions aussi. Est-ce vraiment trop demander de leur part? Non.

Mais si l’article 19 du Régime pédagogique oblige toute école ou garderie à être fermée pendant ces congés religieux, alors il faut bien l'abroger, et il est exagéré de voir là un "chambardement" qui priverait les Québécois de souche de leurs "racines et ailes".

L'article pourrait être remplacé par: "Ces jours sont des congés obligatoires sauf où un contexte culturel exceptionnel ne le justifie pas."

ML

Anonyme a dit…

Les intellectuels devraient aller voir comment la laïcité existe RÉELLEMENT (bien sûr en France) mais aussi en Belgique, en Allemagne (!) en Suède, au Danemark...



La recherche d'une pureté LAÏC idéologique qui s'exprime dans une chasse aux sorcières des symboles religieux risque de mener à un cul de sac ...et au fanatisme.

Il faut garder raison (et respirer par le nez)et se garder du fanatisme anti-religieux qui existe.




Pierre Brassard
Montréal

Anonyme a dit…

Le Québec est gouverné par Power Corp. Inc., Radio-Canada, le MLQ ainsi que le journal le Devoir...

On a affaire à un rouleau compresseur sans pareil...

Le peuple ne mérite pas ça, mais il n'a aucun pouvoir...

Anonyme a dit…

Pauvre Québec...
C'est avec des médias comme celui-là, que le Québec s'achemine vers sa destruction et sa disparition...

Le gouvernement Harper - Inspiré par George W. Bush
http://www.ledevoir.com/politique/canada/285238/le-gouvernement-harper-inspire-par-george-w-bush

Anonyme a dit…

Les Évêques catholiques du Québec ont jeté le bébé avec l'eau du bain.

Ils font harakiri avec l'église catholique au Québec.

Anonyme a dit…

On dirait qu'au Québec, ceux qui ont encore du ''bon sens'', essayant d'analiser l'actualité de façon objective, refusant la pensée unique, ont peur d'affirmer leurs idées tandis que la plupart des gens avec qui j'ai discuté au sujet du chaos dans lequel le Québec s'enlise, je n'ai senti qu'indifférence ou, au pir, agaçement. Comme je l'ai déjà dit dans un commentaire précédent, le peuple préfère la bouffe et les festivals, comme à l'époque de l'empire romain où le peuple réclamait du ''pain et des jeux''.
Rien de nouveau sous le soleil...

Merci d'avoir publié ce texte, monsieur Brassard; j'espère que votre blogue gagnera de plus en plus d'adeptes.

Anne Vaillancourt

Sébas a dit…

@ Anne Vaillancourt:

Oui, je suis d'accord avec votre constat. Mais si c'était justement parce que l'État-Nounou était devenu aussi omniprésent, que les individus devenaient aussi irresponsables... que diriez-vous ?

Comment blâmer les individus, si on leur enlève TOUT pouvoir de décision ?

La Suisse donne un POUVOIR IMMENSE à ses citoyens, et l'État-nounou n'existe peu ou pas, l'endettement non plus et les individus sont responsables... coïncidences ?

Et Rome aussi avait un État-Providence omniprésent... qui rendait ses citoyens "mous" et désintéressés par la "chose publique".

Avant la chute de l'empire Romain, autour de 50% des citoyens vivaient au crochet de l'État-Nounou.... cela ne vous fait pas penser à quelque chose ?

Les mêmes causes, donnent toujours les mêmes résultats...

La nature humaine ne se change pas, les systèmes de gouvernance, oui...

Sébas a dit…

Je partage avec vous cette réflexion:

Si un état prend une place énorme dans la vie de ses citoyens, et si ces citoyens acquièrent le réflexe de demander à l’état de s’occuper de sa santé personnelle, de sa mort, de sa vieillesse, de son enfance, de son éducation, de son alimentation (peut-être un jour?), de son "toit" (?), de ses relations (conjoints de faits ou mariages hétéros ou homos) , etc, pensez-vous qu’il y a une lien à faire entre cette réalité… et le fait…

- que nos corps soient ‘nationalisés’ (ex: l’état veut que nous mangions bien, que nous arrêtions de fumer, que nous nous occupions de nos jeunes/vieux, que nous soyons courtois les uns envers les autres, etc, etc, etc, etc, etc),
- que l’état soit en train de vouloir nous imposer ses valeurs (cours éthique et culture religieuse);
- que les individus deviennent de plus en plus irresponsables(ex: hausse incroyable de l’avortement ‘gratuit’, du suicide depuis les années 70, de la peur de la souffrance, etc);
- que l'individualisme et l'égoïsme soient en augmentation (”ben oui, nous payons tellement d’impôts et le 'wouherneman' va s’en occuper” (sic) );
- que la solidarité -entre individus libres et responsables- baisse de façon drastique;
- que le nivellement par le bas soit présent presque partout,
- etc ?

Avant le révolution tranquille, les Québécois étaient dépendants de l’Église pour la santé, l’éducation, l’aide à l’enfance, pour s’occuper des pauvres, etc et etc.

Mais l’état collectiviste n’existait PAS.

En réalité, l’état n’existait pratiquement pas(son budget était minime et la dette inexistante), sauf pour protéger nos droits individuels fondamentaux, construire quelques routes, etc.

Et aujourd’hui il (i.e. le Québécois), est dépendant de l’état et des syndicats dans presque tous les domaines de sa vie. Le premier ’système’ était basé sur les besoins de l’individu, le 2e est basé sur le collectif (ou ‘le bien commun’).

Quand allons-nous prendre conscience de ces ‘petites’ réalités qui ont un énorme impact -négatif- sur nous tous ?

Quand allons-nous tous revendiquer plus de liberté face à l’état, et ce, pour se responsabiliser?

Quand allons-nous voir que ‘le bien commun’ est probablement la chose le moins définissable au monde (et surtout par l’état ou un syndicat), et que tout ça, ne peut que nous mener vers un mur incroyable.

Quand allons-nous réaliser que plus nos libertés INDIVIDUELLES seront protéger face à l’état (et vraiment toutes nos libertés), et que plus nous analyserons le monde sous le prisme des besoins INDIVIDUELS, plus l’individualisme va baisser et plus la solidarité et la responsabilisation individuelle vont augmenter ?

Ce n’est pas un paradoxe, car il y a vraiment un lien de cause à effet très clair entre les 2.

Nous ne pouvons pas revenir en arrière, mais nous pouvons trouver de nouvelles façons pour se sortir des dérives de la collectivisation/étatisation de nos vies.

Voici une piste et un beau compromis (qui n’en est pas réellement un), entre les droits individuels ’sacrés’ et le ‘bien commun’: des coops d’éducation, de santé, etc.

J’en aurais beaucoup, beaucoup plus long à écrire, mais je m’arrête là.

Qu’en pensez-vous ?

Sébas a dit…

Un prophète ou tout simplement un homme qui savait que l'endettement des gouvernements et des individus, nous rendraient tous 'esclaves' (de nos dettes) et 'mous' (par l'assouvissement de tous nos désirs)?

A écouter (2 minutes, seulement!)

http://www.youtube.com/watch?v=WEDF9MVDAug