mercredi 11 mai 2011

CHEMIN DE TRAVERSE

L’anéantissement du Bloc et le comportement «banc de ménés», ou moutons de Panurge, tellement peu rationnel, des Québécois en faveur du NPD, obligent le mouvement souverainiste à faire le bon choix d’orientation. Il lui faut une bonne boussole.

Déjà, certains maîtres à penser se sont empressés de conclure que les Québécois ont voté à gauche, alors que le reste du Canada a voté à droite, et que l’option de la souveraineté a été, par le fait même, mise au rancart.

C’est allé un peu vite en affaire. D’abord, quand on analyse les motivations du vote NPD au Québec, on se rend vite compte qu’elles sont plutôt…sans grande consistance. Je ne nie pas qu’il y ait des électeurs qui ont voté NPD avec de fortes convictions de gauche (plusieurs commentaires de ce blogue en témoignent), mais je persiste à dire que le vote de l’immense majorité des Québécois n’est d’aucune façon un vote de gauche. C’est un vote de lassitude, de désabusement, d’écoeurement.

Et maintenant, en regardant les résultats, dont plusieurs, dans certains comtés, sont carrément burlesques, ils se sentent plutôt gênés, comme au lendemain d’une «brosse» quand de mauvais souvenirs de conduite humiliante remontent à la mémoire à travers un brouillard éthylique.

La pire erreur que le mouvement souverainiste pourrait faire, ce serait de fonder sa stratégie à partir du clivage gauche-droite.

Le Canada anglais s’installe à droite, le Québec s’incruste à gauche, misons dons sur cette fracture et efforçons-nous de l’élargir. Telle serait, selon certains, la ligne de conduite qu’il conviendrait de tenir. Une pareille stratégie serait pour les souverainistes et, au premier chef, le PQ, une fausse manœuvre. Parce que ne reposant pas sur une prise en compte adéquate et exhaustive de la réalité politique.

La polarisation idéologique droite-gauche ne ferait que masquer et même évacuer du débat public la Question Nationale.

La mission fondamentale du mouvement souverainiste, ce n’est pas de poursuivre la diabolisation d’un gouvernement canadien de droite et de se cantonner dans des postures de gauche pour marquer sa différence, c’est, au contraire, non seulement de reprendre le combat identitaire, mais de mettre en branle ce que Mathieu Bock-Côté appelle « le démantèlement du multiculturalisme québécois », lui-même un appendice ou une excroissance du multiculturalisme canadien.

Et ce démantèlement ne pourra jamais être pleinement achevé, à mon avis, compte tenu de la nature même de l’opération, que dans un Québec indépendant.

C’est tout simple, je l’ai déjà dit et écrit, il nous faut revenir aux sources du mouvement indépendantiste. « Nous, Québécois et Québécoises, sommes une nation, la plus profondément enracinée du continent. Sur l’immensité de notre territoire, partout nos souvenirs anciens comme notre présence vivante nous rappellent que ce peuple est ici chez lui, dans son foyer ancestral. » Qui a écrit cela? René Lévesque, en 1980.

Or, cette nation est en plein désarroi identitaire. Et l’identité d’un peuple, ce n’est pas seulement sa langue, mais c’est aussi sa culture, ses traditions, son patrimoine, matériel et immatériel, son histoire. Il est évident que toute cette substance identitaire est en voie d’érosion et de dégradation sous les assauts ordonnés du multiculturalisme. Cette idéologie, bien implantée dans les structures de l’État et endossée par une large partie de nos élites, est en train de réussir à nous culpabiliser (nous nous sentons coupables d’être nous-mêmes) et à nous pousser au renoncement à notre héritage historique.

Si nous jugeons indispensable de faire la souveraineté, ce n’est certes pas pour mettre en place des politiques ruineuses écolo-réchauffistes, ni pour faire un virage idiotement pacifiste, ni pour surtaxer les salauds de riches, ni pour se doter d’un État encore plus obèse, ni pour soviétiser encore plus notre système de santé, non, si l’on doit aboutir à l’indépendance, c’est pour entreprendre et mener à terme une nécessaire déconstruction du multiculturalisme qui gangrène depuis des décennies l’État, l’école, l’université, la politique d’immigration, l’intégration des nouveaux venus, la métropole, la culture, la mémoire collective (ce qui en reste).

Plusieurs stratèges souverainistes sont tentés d’amplifier l’affrontement entre un Canada anglais de droite et un Québec de gauche espérant que ça finisse par prendre la forme, d’une part, d’un rejet haineux du Québec et des Québécois (exact contrepied de la grande déclaration d’amour des Canadiens anglais à la veille du référendum de 95) et, d’autre part, par contrecoup, chez les Québécois, d’une telle éruption de dépit et de mauvaise humeur qu’ils aspirent ardemment et massivement à l’indépendance.

On a déjà joué dans un film semblable. C’était à l’époque de l’échec de Meech. Les Québécois étaient tellement en furie d’avoir été dédaignés par le Canada anglais, qu’ils ont majoritairement adhéré à la souveraineté. Dans les sondages! Ce fut un feu de paille. Quelques années plus tard, la colère s’est apaisée et le soutien à la souveraineté est retombé à son niveau antérieur (entre 40 et 45%).

Cette stratégie uniquement fondée sur le ressentiment et l’exécration est donc à rejeter.

L’action, le programme, la stratégie du mouvement souverainiste doivent être axés, à mon humble avis, sur la Restauration Nationale.

Toute nation, en s’inscrivant dans la durée, vit une histoire qui lui est propre. Elle se forge une identité. C’est cette identité qui marque ses œuvres et ses travaux. C’est cette identité qui s’exprime à travers sa langue, sa culture, ses traditions, ses valeurs, son patrimoine, sont art de vivre, sa façon d’occuper le territoire et de bâtir ses lieux d’habitation, son enracinement dans un morceau de la Planète qui devient ainsi une patrie.

Si on oublie cette tâche fondamentale de protection, de promotion et de transmission de toutes ses composantes de notre identité, on ne fait pas seulement fausse route, on renonce à ce qui constitue, depuis ses origines, la raison d’être du projet d’indépendance.

De grâce, ne cédons pas aux flagorneries de ceux (et ils sont nombreux ces temps-ci) qui nous disent que notre progressisme étatiste de gauche fait de nous des être supérieurs, brillants et tellement d’avant-garde, face à des Canadiens anglais obtus, rustres et arriérés. Cultiver cet antagonisme, ce serait, pour les souverainiste, s’engager dans un chemin de traverse qui ne mène nulle part.

Jacques Brassard

13 commentaires:

Anonyme a dit…

Le Québec sans héritage culturel est appelé à décliner et à s'éteindre.

Anonyme a dit…

Le cours obligatoire dans nos écoles Éthique et culture religieuse n'est-il pas en fait un cours de multiculturalisme, approuvé à la fois par le PQ et le PLQ? Si oui, se battre contre le multiculturalisme n'est-il pas un combat de Don Quichote puisque cette idéologie est embrassé aussi bien par le gouvernement fédéral que par celui du Québec?

Anonyme a dit…

Combat de Don Quichote? Non.

Combat pour la saine raison. Oui

Audibert a dit…

Bonjour M. Brassard. C'est mon premier commentaire sur votre blogue.
Respectueusement, ne croyez-vous pas que ce clivage gauche-droite a pris une telle ampleur qu'il n'est plus du tout possible d'en faire abstraction. Et que l'Alliance Sacrée de ces forces opposées n'est plus possible dans un parti souverainiste.
Ainsi vous-même aujourd'hui,votre propre position face à la gauche, vous la mettriez en veilleuse?
À quel moment et comment les indépendantistes de droite et de gauche se rassembleraient-ils pour le combat dont vous parlez?

Jimbo a dit…

Wow, c'est tellement beau ce que vous avez écrie, que vous êtes en train de réveiller ma fibre nationaliste. Vous avez visé juste. J'ai abandonné le PQ et le BQ exactement pour ces raisons. L'abandon de notre culture, de nos traditions, notre patrimoine, de notre histoire. Histoire qui est de plus en plus occultés dans nos écoles pour faire place à celle des autres, plus exotique. J'ai donc braqué mon gouvernail vers la droite ...Si cette droite existe réellement au Québec. Vous, n'avez pas envie de reprendre du service M. Brassard ?? Que se passe-t-il sommes-nous à la merci d'une simple métropole et de ses disciples ? J'ai le sentiment d'avoir été trahi, par nos gouvernements, de par leurs politiques de soumission à l'autre "entre autre le cours d'éthique"..... Qu'es qu'ils attendent ? Un printemps Arabe version québécoise ??? Une révolution moins tranquille que la dernière ? J'en suis rendu là, à me demander s'il ne faudrait pas faire table rase de tout ça, leurs montré nos dents, leurs démontrés notre colère....Ben en tout cas la mienne !!!

Martin Duval a dit…

Donc selon vous, lorsque les Québécois votaient massivement pour le PQ en 1976 ou qu'ils votaient massivement pour le Bloc en 1993, c'était bien. Mais là,oh la la, ils votent NPD et vous qualifiez ce comportement de «banc de ménés», ou moutons de Panurge, tellement peu rationnel, des Québécois (...)".

Est-ce que vous respectez vos compatriotes seulement lorsqu'ils sont d'accord avec vous M. Brassard ?

Anonyme a dit…

M. Brassard. Ne faites pas comme M. Parizeau qui n'a qu'un mot dans son vocabulaire. Souveraineté...............

Le Québec est trop perdu pour la souverainté. Il faut oublié ça. Lisez le devoir qui parle de 7000 manifestants pro-vie quand il y en avait 15000 en réalité.

De tels mensonges font peur. Parce que ce journal ne recule devant rien pour dire des mensonges. Et que dire des autres médias?

Anonyme a dit…

79e Congrès de l'ACFAS
Les CPE ont échoué

http://fr.canoe.ca/infos/quebeccanada/archives/2011/05/20110511-061407.html

Jacques Brassard a dit…

Information:
Le service Bloggera flanché et des commentaires ont été effaçés. Prière de me les renvoyer.
Jacques Brassard

Réal a dit…

Je suis bien d’accord que le démantèlement du multiculturalisme québécois est nécessaire pour parvenir à affirmer notre identité nationale. Mais pour l’accomplir nous devons d’abord nous affranchir de la rectitude politique. Or seuls des individus confiants dans leurs valeurs et imminemment responsables auront suffisamment de courage pour s’attaquer à ce formidable défi. Malheureusement, selon moi, les partis politiques qui préconisent l’indépendance du Québec sont ceux qui imposent le plus la rectitude politique et qui accroissent la dépendance des individus envers une machine gouvernementale toujours de plus en plus grande. En somme, pour faire l’indépendance du Québec (ou plutôt pour avoir quelque chance d’en faire un succès), il faut des Québécois indépendants (dans le sens de non dépendant du gouvernement mais capable de s’assumer). Sinon, on risque d’y arriver suite au mouvement d’humeur d’un banc de ménés conduit par un Amir Khadir plus soucieux de multiculturalisme que d’identité québécoise.

Anonyme a dit…

cours Éthique et culture religieuse

Liberté religieuse, le Québec toujours sous la loupe du Département d'État américain

http://pouruneecolelibre.blogspot.com/2011/05/liberte-religieuse-le-quebec-toujours.html

Louis Douglas a dit…

Le multiculturalisme veut simplement dire que nous sommes des citoyens de plusieurs origines, ya pas juste des Québécois de vieille souche française. Tant que les lois et règlements sont les même pour tous, je ne vois pas de problème.

De toute façon, le projet souverainiste, séparatiste, indépendantiste, tidouiste, est depuis le début une farce. C'est juste permettre au gouvernement du Québec d'augmenter son pouvoir sur les individus avec des délires nationalo-collectivistes, afin que nos facteurs individuels tombent dans l'inconscient pour ne faire prospérer que ce qui est collectif; et nous libérer de nos responsabilités individuelles qui seront rejetées sur le «maître». Les Québécois ne croient pu au danger inventé par nos élites qui perdent de leur prestige, l'approbation générale qui faisait de l'élu une vérité collective a perdu de sa valeur primitive, l'individu en a sa claque de cette psyché collective qui le dissout. Le culte de l'État, même au nom d'une nation est une mentalité archaïque.

Évidemment, ils restent des disciples qui vont tout faire pour que le processus revienne suite à ce «schisme», ça commence déjà avec cette fixation sur le NPD qui a détrôné le Bloc qui en menait large depuis trop longtemps.

PPL a dit…

Le PQ et le BQ ne sont pas les outils pour faire l'indépendance. Ils ont échoué. Qu'ils se sabordent ! Qu'ils repartent sous un autre nom ! Quand ca fait 50 ans qu'un parti politique nous propose un produit et que la population le rejette, il faut en tirer une conclusion.