lundi 29 août 2011
DÉNI DE RÉALITÉ
Quel spectacle affligeant! Encore une fois, le mouvement souverainiste bascule dans l’autisme politique, provoquant des tumultes dévastateurs au sein du Parti Québécois et sapant le leadership de Pauline Marois.
C’est toujours le même scénario, le même synopsis.
Dans un premier temps, le chef du parti propose et fait adopter par l’immense majorité des militants une approche, une démarche et une stratégie qui prennent en compte la réalité politique du moment et les préoccupations des citoyens.
Peu importe le nom que vous donnez à cette façon de faire, que ce soit le Beau Risque comme au temps de René Lévesque, ou l’Affirmation Nationale à l’époque de Pierre-Marc Johnson, ou la Gouvernance Souverainiste selon Pauline Marois, on y retrouve le même constat : l’indépendance ne peut advenir dans un avenir prévisible.
Je me suis retrouvé au cœur des deux premiers évènements.
À l’époque de Lévesque, nous avions perdu le référendum sur la souveraineté d’une manière décisive (40%-60%) et le fondateur du PQ se rendait bien compte, même après avoir mené son parti à la plus grande victoire électorale de son histoire en 1981 (près de 50% des voix), qu’il était impossible d’envisager à court et moyen terme d’enclencher un second référendum.
Il fallait plutôt renforcer l’État du Québec affaibli par la défaite référendaire et, si possible, comme le promettait le nouveau PM fédéral, Brian Mulroney, corriger les dispositions infamantes inscrites par Trudeau dans la constitution. Ce fut le Beau Risque!
On connait la suite. Le fondateur du parti, l’un des plus grands leaders politiques de l’histoire contemporaine du Québec, a vécu l’enfer : désertion de plusieurs de ses ministres et députés et rébellion d’une fraction notable des militants.
Résultat : en 1985, le PQ a subi une humiliante raclée lors des élections générales.
Pierre-Marc Johnson, lui aussi, a fait le même diagnostic que Lévesque : impossible d’accéder à la souveraineté dans un horizon visible. Et lui aussi a proposé une démarche de renforcement de l’État Québécois et le rapatriement de certains pouvoirs jugés essentiels à la défense des intérêts du peuple québécois.
Il a commis l’erreur de désigner cette façon de faire «Affirmation Nationale».
Il fut aussitôt lâché et trahi par plusieurs députés. Ensuite, d’obscurs présidents de comtés lui donnèrent le coup de pied de l’âne. Écoeuré, il se retira avec dignité.
Pauline Marois connait présentement le même sort et les mêmes avanies. Ses convictions souverainistes sont mises en doute. La feuille de route qu’elle a fait adopter massivement par les militants au dernier congrès est désormais considérée comme insignifiante et poltronne. Alors, des députés la poignardent dans le dos tandis que des militants l’abandonnent. Pathétique et sordide!
Dans ces trois cas de figures très similaires, il y a une constante : des députés et des militants s’enfoncent pitoyablement dans la schizophrénie politique, c’est-à-dire qu’ils fuient une réalité trop navrante et trop ennuyeuse, s’imaginant pouvoir, à force de vouloir, faire surgir le Québec indépendant.
Et je les entends annoncer «un vent qui se lève» dont eux seuls en ressentent le souffle. Et je les entends ressasser un vieux mantra magané : « On ne parle pas assez de souveraineté, tel est le problème!». Comme s’il suffisait d’en parler pour qu’aussitôt les citoyens se mettent en mode écoute.
En 25 ans, j’ai participé à plusieurs de ces tournées où l’on allait enseigner au bon peuple les vertus de la souveraineté. «Sortir, parler, convaincre», tel était le slogan d’une de ces virées d’autrefois.
Et ça donnait quoi? Pas grand-chose. La plupart du temps, on prêchait à des convertis. Les citoyens avaient d’autres soucis, d’autres chats à fouetter.
Ce qui est le cas présentement. Il faut vraiment vivre dans une autre galaxie pour croire que les Québécois meurent d’envie qu’on leur parle de souveraineté. Je vis et j’ai toujours vécu dans un coin de pays (le Lac-St-Jean) dont les électeurs ont voté OUI à 72% au dernier référendum, celui de 1995. Pas mal, non? Et je peux vous assurer hors de tout doute (parce qu’ils me parlent et m’interpellent continuellement) qu’ils ont d’autres préoccupations et d’autre urgences.
Non pas parce qu’ils ont changé d’idée (ils adhèrent encore massivement à l’option souverainiste), mais tout simplement parce qu’ils ont la conviction que le temps n’est pas venu de reprendre ce débat fondamental sur notre avenir comme peuple.
Qu’est-ce qui explique, selon vous, que François Legault performe aussi bien dans les sondages? Ce n’est pas sorcier, c’est parce qu’il proclame qu’il entend s’attaquer aux problèmes criants de la société québécoise. Propose-t-il les bonnes solutions en éducation, en santé, en matière de culture, de langue, d’immigration, de finances publiques et de développement économique? Ça, c’est une autre histoire! Je le trouve à bien des égards timoré et frileux. Et n’osant pas trop remettre en question les fondements de notre coûteux État providence.
Mais, au moins, il a le mérite de viser les bonnes cibles. Pendant ce temps-là, au PQ et chez les déserteurs débranchés, on pontifie de nouveau sur l’élection référendaire, ou le référendum d’initiative populaire, ou le mode de scrutin, ou l’élection du Premier Ministre au suffrage universel.
C’est quand même sidérant qu’un député de la «nouvelle génération» comme Bernard Drainville en soit arrivé, après une consultation dite «citoyenne» (tous les machins-trucs «citoyens» --consultation, mouvement, action, réflexion, coalition —ont le don de me crisper et de me mettre en rogne), à du vieux réchauffé sur les institutions.
Bref, on se propulse allègrement dans un monde parallèle!
Et la question que tout le monde se pose : quand, chez Pauline Marois, l’écoeurement va-t-il atteindre le niveau maximal, provoquant alors son départ? Va-t-elle réussir à surmonter le dégoût que lui inspire sans doute la félonie venant de son propre camp et rester malgré tout? Pour le moment, elle s’accroche!
Mais si elle décidait de rentrer dans ses terres, qu’adviendrait-il du PQ? Les députés et les militants doivent sûrement avoir en tête l’anéantissement du Bloc le 2 mai dernier. Se rendent-ils compte qu’au dernier congrès, ils ont raté le coche en renforçant l’ancrage du parti à gauche, une gauche écolo-syndicalo-étatiste totalement impuissante à procéder à une profonde et nécessaire remise en question du «modèle québécois», un modèle à la fois ruineux, inefficace et sclérosé.
Quant aux mutins fébriles et extravagants, leurs manœuvres de sabotage risquent d’entraîner la mort du PQ. En sont-ils conscients? Pas sûr! Ils sont tellement déconnectés du Réel qu’ils s’imaginent sans doute faire œuvre utile, alors qu’ils nuisent à la cause qu’ils prétendent servir.
Oui, vraiment, le spectacle est affligeant!
Et Jean Charest, lui, détendu et la mine réjouie, observe en silence les ravages des pulsions auto destructrices qui sont à l’œuvre au sein du PQ.
Jacques Brassard
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13 commentaires:
Observations et commentaires justes. Mais la Vraie question est pourquoi le mouvement, incarné par le PQ, se saborde-t-il ?
Je trouve que ça fait pitié et ça sent un peu le corporatisme. On veut un Pays pas tellement pour les vertus qui viennent avec, mais plutôt pour se donner des plus gros titres et de plus gros budgets. Pourquoi se limiter à gérer un budget de 60 $ milliards quant on peut en gérer un de 100 $Milliards, sauf qu'on a oublié ce qu'on pourrait faire avec.
M. Brassard vous aimez encore la politique partisane.
Mais le Québec a besoin de plus que de la parlotte... Ça revient tout au même de toute façon.
Il faut oublier l'indépendance. Le Québec n'a pas les moyens et la dignité pour la faire. Il n'y pas urgence non plus. Le Québec est trop lié au Canada et à son histoire.
Le relativisme moral de nos élites médiatiques, religieuses et politiques mène le Québec à la faillite....
Quand on pense que ça voulait "diriger un pays..."!
On l'a échappé belle.
Quelle justesse d'analyse. Elle s'impose comme allant de soit. Mais comment se fait-il que les membres du PQ ne le voient pas ainsi?
Et que dire de l'arrivée de Gérald Larose dans le décor ? N'est ce pas merveilleux de voir ce grand homme s'impliquer au PQ ??? Le Québec a besoin des lumières de la CSN !Le PQ n'écoute plus le peuple. Le PQ ne cherche qu'une chose: nous enfoncer dans la gorge sont idéologie collectiviste-marxiste-verte-souverainiste. C'est cela la démocratie pour le PQ ? Legault est loin d'être parfait, mais au moins il propose qqs petits changements et ne nous écoeure pas avec le référendum. De plus, il ne couche pas avec les syndicats. Plus le PQ va sombrer dans les sondages, et plus il va persister dans sa folie autiste auto-destructrice.
Lorsqu'on écoute ou qu'on lit ceux qui dénoncent le P.Q. de l'intérieur,on s'aperçoit à quel point ils sont débranchés du Québec réel,et jusqu'à quel point ils ont participé au débranchement du P.Q. lui-même.
François Legaut dénonce depuis longtemps le déni des indépendantistes.Il monte dans les sondages.Que font les débranchés ? Ils lui donnet raison
Bravo Jacques! Encore une fois tu frappes dans le mille! Désolant d'entendre un élu entrevoir la venue de l'automne de la souveraineté dans le sillage du printemps arabe! Non mais sur quelle planète est-il?
Hors sujet, mais important quand même: à lire.
http://www.drzz.info/article-grandiose-le-mensonge-du-rechauffement-climatique-denonce-par-un-satellite-jean-patrick-grum-83782798.html
G.F.
Les francophones bientôt minoritaires à Montréal, légère baisse des francophones dans l'ensemble du Québec
http://pouruneecolelibre.blogspot.com/2011/09/les-francophones-bientot-minoritaires.html
Le sexe des anges
http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/331026/le-sexe-des-anges
Hors sujet aussi, mais important.
Bon lundi.
http://www.drzz.info/article-breaking-news-tout-un-village-chretien-d-egypte-affame-par-les-musulmans-par-jean-patrick-grumbe-84044719-comments.html#anchorComment
Pas mal notre intello Laffitte...
Gaston Miron ou la triste histoire d'un homme
http://www.cqv.qc.ca/fr/gaston-miron-ou-la-triste-histoire-dun-homme
Merci Madame Marcotte, les tabous commencent à tomber. Enfin!
Il faut poursuivre. Pourquoi, le multimuclturalisme est un échec. L’occident n’a plus de valeurs autre que le relativisme.
Je viens d’écouter le Prof. Salim Mansur. C’est exactement ce qu’il dit.
Et avec l’hiver démographique qui s’en vient. Personne ne veut en parler. C’est ça qui est révoltant. Il y a des solutions. Mais c’est la censure que s’imposent les médias et les blogues qui ne veulent pas en parler.
Moi je veux en parler…
Film. Hiver démographique: le déclin de la famille humaine
2 Episodes
http://byutv.org/show/5e819b00-5e99-4bf4-931e-c154d3c2dc8d
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