Un lecteur anonyme (dont vous pourrez lire le commentaire ci-dessous) me semonce et me critique parce que j’ai précisé à propos de l’Agité du Plateau «que l’antisionisme est la forme contemporaine de l’antisémitisme». Il conclut sa missive par un «n’importe quoi!» méprisant. Ce qui, je l’avoue, m’a agacé et piqué au vif.
Je ne suis évidemment pas le seul à affirmer un lien indissoluble entre antisémitisme et antisionisme. Pierre-André Taguieff, dans un livre-phare sur la question, intitulé La Judéophobie des Modernes, démontre, en long et en large, et sur la base d’une abondante documentation, qu’à l’époque du Jihad islamiste (c’est notre époque) la haine du Juif (la plus vieille haine du monde) a revêtu la défroque de l’antisionisme, c’est-à-dire une virulente négation de la légitimité de l’État juif et une volonté acharnée de l’anéantir.
Il suffit d’ailleurs de faire l’effort de prendre connaissance des motivations profondes (et affichées) sur lesquelles s’appuie le refus systématique de reconnaître l’existence de l’État juif, pour constater que c’est la haine du Juif (une haine tenace, féroce, pathologique) qui en est le principal fondement.
L’axe doctrinale de l’islamisme radical est très claire : il faut éradiquer l’État juif… parce qu’il faut effacer toutes traces de la présence juive au Proche et au Moyen-Orient; l’antisionisme (le refus de l’État hébreu) est nourri et justifié par l’antisémitisme (la haine du Juif).
Si vous ignorez cette haine, présente dans tous les discours et toutes les actions de toute la nébuleuse islamiste et jihadiste (théocratie iranienne, Hamas, Hezbollah, Frères Musulmans, Al Qaida, Fatah etc.), c’est que vous pratiquez l’aveuglement et la surdité volontaires.
Par conséquent, les occidentaux, surtout de gauche, qui soutiennent, prétendument pour lutter contre le néo-colonialisme, la position antisioniste des islamistes de tout poil, et tout particulièrement celle des Palestiniens (incarnant à leurs yeux la Victime exemplaire et l’Opprimé par excellence), cautionnent du même coup l’antisémitisme, c’est-à-dire la haine du Juif, qui constitue le sous-bassement idéologique de cette position.
Si vous ne voyez pas la jonction essentielle, l’accouplage indissoluble entre les deux, c’est que vous faites partie de la grande cohorte des Idiots Utiles.
Dernière remarque. Quand vous affirmez qu’il y a des «millions de Juifs qui, pour des raisons religieuses et personnelles, sont contre l’existence d’Israël», là, vraiment, vous débloquez à fond! Des millions!? Comme vous dites à mon propos…c’est n’importe quoi! Je sais très bien qu’il existe certains ultra-orthodoxes et certains hyper-gauchistes juifs (tel Noam Chomsky) qui pensent ainsi, mais des millions? Quand même! Soyons sérieux!
Il faut, par ailleurs, savoir faire la différence entre critiquer les décisions et les actions du gouvernement israélien (ce qui est une réalité constante, aussi bien en Israël que parmi les amis d’Israël, parce que, voyez-vous, Israël est une démocratie, une authentique) et nier la légitimité et le droit à l’existence de l’État juif.
Je sais bien que je ne vous aurai sans doute pas convaincu. Et je sais aussi très bien que vous ne lirez probablement pas le livre exceptionnel de Pierre-André Taguieff.
Et je crains que vous ne lirez pas non plus le livre remarquablement lucide de Michel Gurfinkiel : Israël peut-il Survivre? La Nouvelle Règle du Jeu.
Je me permets d’ailleurs, en conclusion, de vous citer un extrait de ce dernier.
«Être promis à la destruction par les uns, être abandonné par les autres : aucun peuple ne peut prendre à la légère une telle situation. Israël moins qu’un autre. Le peuple juif garde dans sa mémoire collective d’autres génocides et d’autres trahisons : l’Égypte pharaonique, la Perse achéménide, la Rome d’Hadrien, l’extermination des juifs et des judaïsants d’Arabie, les expulsions d’Angleterre, de France, d’Espagne, les pogroms d’Occident et de Russie, et enfin la Shoa. Quand le président de la République islamique iranienne, Mahmoud Ahmadinejad, affirme —en accord avec le guide spirituel Ali Khamenei – qu’Israël doit être «rayé de la carte» (2005) ou qu’il est entré «dans le processus de l’anéantissement» (2008), les Israéliens et les autres juifs à travers le monde se rappellent d’autres imprécations, dans le Reich allemand des années 1930. Qui furent suivies d’effet.»
L'État d'Israël est un État de trop et , pour reprendre l'expression de Taguieff, «le peuple juif est un intrus dans le genre humain», telles sont les deux faces du fantasme idéologique qui surplombre le monde contemporain.
Jacques Brassard
dimanche 5 juin 2011
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12 commentaires:
C'est plat au Québec. Il n'y a plus de vie, plus de débats sérieux. C'est le prélude d'une mort certaine.
Personne ne veut énoncer des opinions basées sur la raison. Car on se fait traiter d'anti-raison. On se fait pointer du doigt. Il faut presque se cacher.
Personne ne veut briser la glace pour sortir du cercle vicieux. Mettre de la vie dans les débats. Mettre de la vie. On est devenus des chiens de Pavlov. Si tu dis quelque chose de raisonnable, on te punit.
L’antisionisme est effectivement la forme contemporaine de l’antisémitisme. Pourquoi? Parce que la plupart des antisémites n'osent plus le dire (ça ne fait plus chic; ce n'est plus accepté en bonne société). Ils se camouflent alors en se disant antisionistes.
Vous cherchez un antisémite? Ils se retrouvent tous sous les chapeau de ceux qui se disent antisionistes.
Cependant certains antisionistes ne sont pas antisémites. Parmi ces antisionistes non antisémites, on trouve 5 000 ou tout au plus 10 000 juifs ultraorthodoxes qui ne peuvent concevoir l'établissement d'Israel qu'après l'arrivée du Messie.
Dans nombre de pays musulmans, les juifs n'ont pas les mêmes droits fondamentaux que les musulmans. On peut donc nommer antisémites tous ces pays. Tolérer les juifs en tant que dhimmis, c'est de l'antisémitisme au même titre que tolérer les noirs en tant qu'esclaves est du racisme.
Quand on n'est pas raciste, on ne discrimine pas contre les noirs. Si on le fait, on est forcément raciste. Quand on n'est pas antisémite, on ne discrimine pas contre les juifs. Si on le fait, on est forcément antisémite.
Plusieurs croient qu'il faut hair (ou discriminer contre) tous les juifs pour être antisémite. Cela n'a jamais été le cas dans l'histoire. Tout antisémite vous dira aisément qu'il a un "meilleur ami juif", ou presque, ou qu'il apprécie un juif en particulier! Il n'en demeure pas moins antisémite!
Pour être antisémite, il suffit d'hair la plupart des juifs. Comme la moitié des juifs du Globe vivent en Israel, ou y vivront bientôt, il est de plus en plus difficile de se dire antisioniste sans être antisémite. Ce sera impossible, à mon avis, à partir du moment où la plupart des juifs vivront en Israel.
Pourrait-on être contre l'existence des Etats-Unis tout en n'acceptant pas le qualificatif d'anti-Américain? Absolument pas. Pourtant, ce n'est pas 100 % des Américains qui vivent aux Etats-Unis.
Peut-on être contre l'existence d'Israel tout en n'acceptant pas le qualificatif d'antisémite? Presqu'impossible. Et absolument impossible dès que la plupart des juifs vivront en Israel.
M. Brassard,
C'est parfait que vous remettiez les points sur les i aux antisionistes amis des islamistes et antisémites.
Malheureusement, cette espèce est majoritaire au Québec grâce à la désinformation dans nos médias gauchistes.
Je lis régulièrement Guy Millière et Alexandre Del Valle qui sont des types très au fait de ce qui se passe dans le domaine géo-politique.
Quant à Amir Khadir, je le répète, je le trouve pernicieux. Bonnes vacances et si vous pouvez nous envoyer des billets d'Italie sur votre blog, on va bien aimer.
En 1941, de nombreux dirigeants spirituels iraniens disaient que le 12ème Imam avait été envoyé par Dieu sous la forme d' Adolf Hitler.
(P. 840 de "A lethal obsession:anti-semitism from antiquity to the global Jihad", de Robert S. Wistrich.)
PS: les livres de Taguieff sont excellents. Je recommande particulièrement:
1) "La nouvelle propagande antijuive".
2) "Prêcheurs de haine; traversée de la judéophobie planétaire".
J'ai aussi de bons souvenirs de "La judéophobie des modernes."
Une statistique intéressante:
Pas moins de 176 juifs se sont vu décerner le prix Nobel.
Ce qui représente 23% des prix Nobels dans le monde entre 1901 et 2007.
Cela représente 27% de la recherche fondamentale mondiale dans les domaines de chimie, médecine, physique et économie.
(Les juifs comptent pour 0.25% de la population mondiale).
· Chimie (29 lauréats, 19% du total mondial)
· Economie (25 lauréats, 41% du total mondial)
· Littérature (13 lauréats, 13% du total mondial)
· La Paix (9 lauréats, 9% du total mondial) 3
· Physique (47 lauréats, 26% du total mondial, 38% du total US)
· Physiologie ou médecine (53 lauréats, 28% du total mondial)
La communauté musulmane représente approximativement
1 200 000 000 de personnes, Soit : 20 % de la population mondiale. Ils ont reçu les Prix Nobel suivants :
Littérature: 1957 - Albert Camus 1988 - Najib Mahfooz. Paix: 1978 - Mohamed Anwar El-Sadat 1994 - Yasser Arafat Physique: 1990 - Elias James Corey 1999 - Ahmed Zewail Médecine: 1960 - Peter Brian Medawar 1998 - Ferid Mourad
source: http://identitejuive.com/prix-nobel-juifs/
http://www.alliancefr.com/actualite/desinformat/monde.html
http://www.drzz.info/article-video-la-religion-de-paix-et-d-amour-vous-conseille-par-jean-patrick-grumberg-75842234.html
@M. Du Berger: mon article, intitulé "Les prix Nobel et les juifs, avec détours par les mathématiques et les échecs", vous intéressera:
http://jssnews.com/2011/04/09/nobel-juif/
Veuillez bien également lire mes commentaires à 00:55 et 14:10 de cet article: ils apportent des détails additionnels pertinents.
Je vous recommande ma documentation en complément à vos 2 sources, car elle est plus équitable et contient, je crois, moins d'erreurs. Vos 2 sources donnent une bonne idée générale des tendances, mais elles exagèrent la contribution juive en considérant comme juif tout prix Nobel dont un parent est juif. (Si tous les prix Nobel avaient un parent juif et un parent catholique, vos sources concluraient que 100 % des prix Nobel sont juifs et 100 % sont catholiques, pour un total de 200 %!) Dans ma documentation, je ne considère comme prix Nobel juif que celui dont la mère est juive, et celui qui s'était converti au judaisme (Anfinsen, par exemple). C'est plus équitable, et plus juste pour l'élément non juif. Dans l'exemple fictif donné plus haut, et en supposant une distribution aléatoire du sexe des parents, ma documentation dirait que 50 % des prix Nobel sont juifs et 50 % sont catholiques.
Concrétement, et pour fin de comparaison avec vos sources, ma documentation identifie 151 prix Nobel juifs de 1901 à 2007, contre 176 selon vos sources.
Quant aux prix Nobel musulmans, vos sources décrivent bien la tendance générale (voir mon 14:10), mais elles errent substantiellement: par exemple, Albert Camus et Peter Medawar ne sont pas musulmans.
L'avantage de ma documentation est qu'elle défend bien votre message tout en prêtant moins flanc à la critique, pour la simple raison que ma documentation, si elle erre, erre par sous-estimation la contribution juive.
En somme, je vous recommande ma documentation pour estimer le nombre minimal de prix Nobel juifs, et vos 2 sources pour en estimer le nombre maximal. Si ma documentation erre, c'est par un excès de prudence. Par exemple, de 1901 à 2005, c'est 28 %, et non 23 %, des prix Nobel d'Economie qui ont été obtenus par des juifs (16 sur 57)! J'arrive à 19 sur 61 (31 %) pour la période 1901-2007, alors que vos 2 sources donnent 25 sur 61 (41 %).
honorable, professeur, Université McGill
Donnez leur du pain et des jeux. Le maire Régis Labeaume et Jean Charest financent un aréna - avec les taxes - où les gens vont pouvoir enrichir Péladeau et Céline à coup de billets verts, rouges, et bruns.
@honorable ; Merci pour ces précisions et cette rigueur. Quand j'étais jeune et que je faisais un mauvais coup, ma mère me traitait de "p'tit juif" croyant ainsi me vexer. Je sais maintenant que c'était un compliment... involontaire.
@Reynald Du Berger: mon père, bien que nullement antisémite, me lancait également des "mon p'tit juif" amicaux dans de telles circonstances. Cela arrivait entre les âges de 4 et 8 ans. Pas après. Je ne sais toujours pas si c'est mon comportement qui a changé, ou le vocabulaire de mon père...
je suis sûr que c'était une expression réflexe, utilisée sans savoir ce que les mots voulaient dire. Tout comme l'expression "Moses" —je pensais que ça s'écrivait "mauzuss"—, utilisée souvent dans notre famille bien élevée, i.e. qui s'abstenait de sacrer ou dire "maudit". Ce mot était utilisé innocemment, sans savoir qu'il signifiait "Moïse" et que ce n'était donc pas très loin d'un bon "Christ" bien senti...
On sait un certain monde arabe (et leurs supporters islamofascistes et islamogauchistes) féru de négativisme. C'est pourquoi il célèbre annuellement la Nakba (défaite de 1948 face à la petite armée israélienne, et apparition d'Israel sur la carte) et la Naksa (la défaite de 1967 qui remet entre les mains d'israel Jérusalem entier, ainsi que la Judée-Samarie).
Dans cette même veine, je les invite à célébrer, le 10 décembre de chaque année, la NakbaN ou encore la NaksaN: la création du prix Nobel, puisque, décade après décade, sinon année après année, ce prix "humilie" le monde arabe au "profit" du monde juif!
Peut-être cette 3ème "fête" les aiderait à prendre conscience du caractère révisionniste des 2 premières, et de leur fâcheuse tendance à laisser le passé menotter et figer inutilement leur avenir...
Mr Brassard
Merci pour votre clarte
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